Rapport sur les habitudes de consommation de médicaments et de recours aux soins de santé chez les personnes décédées d’une intoxication liée aux opioïdes en Ontario durant la pandémie de COVID-19

Communiqué

18 janv. 2022

TORONTO – Un Ontarien sur quatre ayant succombé à une surdose d’opioïdes pendant la pandémie avait consulté un professionnel de la santé dans la semaine précédant son décès, ce qui laisse entendre que l’on a sans doute raté des occasions de venir en aide à des personnes qui risquaient de faire une surdose, révèle un nouveau rapport.

Le rapport, qui fait suite à des données publiées en mai 2021, examine des décès accidentels attribuables aux opioïdes en Ontario, de mars à décembre 2020, ainsi qu’avant la prise de médicaments d’ordonnance et le recours au système de santé par les sujets décédés, afin de déterminer s’il aurait été possible d’offrir un soutien à ces personnes et de prévenir leur mort. Le rapport a été produit par des chercheurs du Réseau de recherche sur les politiques ontariennes en matière de médicaments (ODPRN) de l’Hôpital St. Michael (Unity Health Toronto), l’ICES, le Bureau du coroner en chef de l’Ontario et Santé publique Ontario.

Les données montrent que les personnes mortes d’une surdose d’opioïdes ont eu des interactions fréquentes avec le système de santé – soit des consultations externes, des consultations pour obtenir des soins primaires ou à l’urgence ou une admission à l’hôpital – dans la semaine et le mois précédant leur décès. Les résultats révèlent également que seulement le quart des sujets décédés avaient obtenu une ordonnance récente d’opioïdes avant leur mort, et que dans près de la moitié des cas, il s’agissait d’une ordonnance de méthadone, un opioïde synthétique servant à traiter des troubles liés à l’utilisation d’opioïdes.

Contrairement aux idées reçues, les personnes qui consomment des drogues ont souvent recours à des traitements et maintiennent un lien avec le système de santé; cependant, ces interactions pourraient être mieux ciblées pour répondre aux besoins des personnes qui risquent de faire une surdose.

« Ces interactions avec des professionnels de la santé sont une occasion d’aiguiller les personnes qui consomment des drogues vers des programmes et des services communautaires – incluant un accès à des traitements et à des services en santé mentale, en réduction des méfaits et en aide au logement », explique la Dre Tara Gomes, auteure principale du rapport, scientifique au Li Ka Shing Knowledge Institute de l’Hôpital St. Michael et à l’ICES, et chercheuse principale du ODPRN.

« En effet, nous avons observé que le quart des sujets avaient eu recours au système de santé, dans différents contextes, pendant la semaine précédant leur décès, ce qui laisse entendre que nous avons raté d’importantes occasions de venir en aide à des personnes courant le risque d’une surdose. »

Le rapport, reposant sur des données de l’ICES, un institut de recherche sans but lucratif, révèle ce qui suit :
  • Un sujet sur quatre avait eu recours à un service de santé dans la semaine précédant son décès; la moitié des sujets étudiés avaient consulté dans le mois précédant leur décès.
  • Une personne sur trois décédée pendant la pandémie avait eu accès à un traitement par agonistes opioïdes au cours des cinq dernières années, et seulement une sur dix au cours des 30 derniers jours.
  • Parmi les personnes suivant un traitement à la méthadone au moment de leur décès, les deux tiers avaient visité une clinique ambulatoire dans la semaine précédente, mettant ainsi en lumière d’autres occasions d’aiguiller ces patients vers des mesures de soutien additionnelles.
  • Deux décès sur trois sont survenus chez des personnes présentant un trouble lié à l’utilisation des opioïdes (TUO), ce qui signifie qu’un tiers des surdoses mortelles pourraient survenir chez des personnes sans diagnostic de TUO, ou chez des personnes qui consomment des drogues de façon occasionnelle ou intermittente.
Même si l’on accuse traditionnellement les opioïdes sur ordonnance d’être les principaux responsables de la crise des surdoses, le rapport montre que c’est plutôt l’approvisionnement de drogues non réglementé, essentiellement le fentanyl, qui est à blâmer. Le rapport montre ce qui suit :
  • 89 % des décès sont attribuables à des opioïdes non pharmaceutiques, principalement le fentanyl.
  • On a observé une multiplication par cinq de la détection de benzodiazépines non pharmaceutiques dans les événements toxiques mortels aux opioïdes pendant la pandémie. Ces drogues sont souvent présentes dans l’offre d’opioïdes non réglementée et peuvent approfondir la sédation et complexifier les interventions dans le contexte d’une surdose lorsqu’elles sont mélangées à des opioïdes.
  • Un décès sur dix pendant la pandémie n’impliquait que des opioïdes d’origine pharmaceutique.
Plus de 2 000 personnes sont mortes en Ontario d’une surdose d’opioïdes accidentelle de mars à décembre 2020. Les taux de surdose d’opioïdes mortelle en Ontario ont presque doublé chez les hommes pendant la pandémie, et ont augmenté de 79 % chez les personnes âgées de 25 à 44 ans. Le nombre de décès attribuables aux opioïdes chez les personnes en situation d’itinérance a doublé. Dans le nord de l’Ontario, les taux observés étaient trois fois supérieurs à ceux des régions du sud de la province pendant la pandémie.

« On entretient souvent l’idée que les gens qui présentent un risque de surdose sont étrangers au système de santé, mais nous avons constaté que les personnes qui sont mortes d’une surdose avaient consulté des professionnels de la santé à plusieurs reprises dans la semaine et le mois précédant leur décès », explique la Dre Gillian Kolla, coauteure du rapport et titulaire d’une bourse postdoctorale au Centre MAP pour des solutions de santé urbaine de l’Hôpital St. Michael.

« Même si le maintien d’un accès aux services est important, les données laissent également entendre que l’on pourrait en faire davantage pour s’assurer que ces consultations répondent mieux aux besoins des personnes qui consomment des drogues. »

Les auteur.e.s du rapport indiquent que leurs conclusions pointent vers un accès élargi à des traitements comportant peu de restrictions dans différents contextes de soins (comme les hôpitaux et les établissements de soins primaires), à des services de réduction des méfaits à plus vaste portée (comprenant des sites de consommation supervisés), à un approvisionnement en drogues plus sécuritaire et à des logements abordables.

« Les pertes de vies attribuables à des événements toxiques aux opioïdes en Ontario se sont alourdies pendant la pandémie de COVID 19. Pour nous aider à élaborer des politiques visant à prévenir ces décès, il importe de comprendre la nature des liens qu’entretiennent les utilisateurs d’opioïdes avec le réseau de la santé, les systèmes de soutien et les services de réduction des méfaits », explique le Dr Dirk Huyer, coroner en chef de l’Ontario.

Le rapport a été financé par le gouvernement de l’Ontario et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).
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Publié le 18 janv. 2022